Quand la Fédération des associations portugaises de France (FAPF) a eu confirmation que le Club Unesco des Pays-Bas doublerait la somme déjà collectée par la FAPF (10 000 US dollars) pour construire une école à Timor, celle-ci a pris contact avec l'association France-Timor Leste pour l'aider dans la suite des opérations.
Lors du déplacement annuel qui a suivi (été 2005), des rendez-vous ont été pris avec l'Administrateur du district de Dili, Ruben Braz de Carvalho, pour déterminer à quel endroit l'argent serait le plus utile. C'est le Délégué du Ministère de l'Education pour le district qui a eu la responsabilité d'identifier les trois ou quatre carences les plus criantes du district, pour lesquelles l'Etat timorais ne prévoyait pas d'intervention à court terme. Nous avons visité les lieux pré-sélectionnés et le choix est devenu évident : le petit village de Casnafar. Celui-ci est situé en montagne, dans l'une des zones reculées du district, près de la limite administrative qui sépare les districts de Dili, de Liquiça et de Aileu. Comme bon nombre d'autres villages du pays, Casnafar n'est pas un village groupé, il s'agit plutôt d'un habitat dispersé le long de la rivière de Comoro. D'ailleurs, ses habitants cultivent le fond de vallée, spécialisant la région dans une production maraîchère qu'ils vont vendre à Dili. Le lit de la rivière, asséché la plupart de l'année, constitue par ailleurs une voie de communication vers la capitale, tandis que durant la mousson, il isole totalement le village, coupant tout accès en particulier vers Dili.
Le contexte scolaire est le suivant : le village utilise une petite chapelle pour faire fonctionner, du lundi au vendredi, une école où enseignent deux professeurs volontaires. L'appellation "Volontaire" désigne les enseignants qui n'ont pas les diplômes requis pour travailler dans l'enseignement public et qui sont payés directement par les parents. Tous les vendredis, les quelques objets qui identifient l'école, comme des chaises d'enfants en plastique et un tableau noir, sont enlevés, et le lieu est prêt pour la messe du dimanche. Le lundi tout est remis en place et la chapelle retrouve son office scolaire. C'est plutôt intelligent comme système, mais tout le monde tombe d'accord sur la nécessité de faire mieux. Le désir des villageois de voir construire une "vraie" école n'étant pas nouveau, un terrain est déjà réservé à cet effet et le chef de village nous le montre. De plus, compte tenu de la localisation du village, nous comprenons rapidement, en discutant avec les habitants, qu'une école construite à cet endroit pourrait aussi servir aux enfants des familles des deux autres districts qui vivent à une relative proximité. Le représentant de l'Etat s'engage à voir la chose avec ses collègues des deux autres districts limitrophes.
Au-delà de la construction, on sait que dans une école le plus important est le prof' et cette question est fondamentale pour nous. Pour poursuivre le projet, nous demandons que la future école primaire soit bien inscrite dans la carte scolaire officielle et que ses enseignants soient bien nommés par l'administration et rattachés à un groupe scolaire qui leur apportera un soutien pédagogique. Ils seront rattachés au groupe scolaire de Manleuana, dont nous avons rencontré la directrice et les enseignants. Il restait encore à régler le problème des enseignants "volontaires". Pour nous, il n'est pas question qu'ils soient les perdants de cette réorganisation ; nous demandons donc à l'administration qu'ils puissent suivre les formations requises pour intégrer l'enseignement public.
A la fin de cette première mission, les choses sont si bien engagées que nous pensons que "ya-pu-ka" construire l'école. Mais dans le réel les choses sont un peu plus complexes. En 2006, le pays a connu une crise profonde, frôlant la guerre civile. Pour ce qui est de l'école, l'entrepreneur qui s'était engagé à la réaliser et qui devait en faire les plans détaillés, ne nous a plus donné signe de vie, le délégué de l'Education nationale qui était notre interlocuteur a été écarté de son poste par le Gouvernement (pour des raisons qui n'ont aucun rapport avec notre histoire, ça va mieux en le disant…), les communications avec les administrations en général sont devenues un peu compliquées.
Pour faire court, c'est seulement en août 2007, lorsque nous sommes revenus pour un nouveau séjour dans le pays que des pas décisifs ont été faits. Nous avons d'abord approché à nouveau l'entrepreneur pressenti dès le début, lequel nous a proposé un budget en très forte augmentation, dépassant de très loin la somme disponible pour la construction, et que nous avons du rejeter. Il a alors fallu identifier très rapidement un autre entrepreneur, disponible et ayant de l'expérience en matière de constructions scolaires, et nous l'avons trouvé. Parallèlement, le contact a été rétabli avec l'Administrateur du District qui a survécu à la crise et aux divers remaniements politiques et administratifs et, à travers lui, avec le nouveau Délégué du Ministère de l'Education pour le District, l'Administrateur du sous-district, le Chef de suco de Dare et le nouveau chef de village issu des premières élections locales (l'ancien chef, qui avait offert le terrain, n'a pas été re-élu…).
Deux réunions ont eu lieu sur le site avec tous les intéressés, les différents niveaux de l'administration, les enseignants et quelques familles. Tout le monde était au rendez-vous. Les villageois s'engageaient à niveler le terrain et l'entrepreneur s'engageait à recruter toute la main d'œuvre non qualifiée dans le village. Bref, l'école n'avait jamais été aussi prête d'être construite ; il ne manquait plus qu'une chose : l'argent. Comme rien n'est simple, il a fallu encore un certain temps à la FAPF pour faire parvenir la somme de 20 000 dollars au compte "Une école pour Timor" créé par l'Administration du District à la banque BNU à Dili. Depuis la mi-novembre c'est chose faite, les travaux peuvent commencer et nous ne pouvons qu'espérer que le toit soit posé avant les grosses pluies de la mousson. Urgentissime…
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